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Une année 2022 difficile pour la BIO en France

Depuis 2021, les Français se détournent des produits issus de l’agriculture biologique, alors que les ventes connaissaient une croissance à deux chiffres de leur chiffre d’affaires depuis 2014. A contre-courant de l’essor rencontré pendant la crise sanitaire de 2020, où les Français avaient plébiscité la bio.
Alors, s’agit-il d’une simple mauvaise passe conjoncturelle, ou bien de difficultés structurelles ?

Une baisse de la consommation inédite

Selon les dernières données de l’Insee parues le 15 décembre, l’inflation sur les produits alimentaires a atteint en novembre 2022 près de + 12,1 % sur un an en France, et jusqu’à + 12,7 % sur les produits frais. Ce qui en fait le deuxième poste responsable de la hausse des prix à la consommation, derrière l’énergie (+ 18,4 %). Par conséquent, on observe des arbitrages des Français sur leurs dépenses notamment alimentaires. Ainsi, la consommation des ménages en produits alimentaires est en baisse depuis novembre 2021. Cette évolution n’est pas seulement le résultat d’un retour à la normale de la consommation à domicile face à la réouverture de la restauration hors foyer. En effet, la baisse est telle que le niveau de consommation alimentaire des Français est passé, depuis le mois de mai, sous le niveau moyen de la période 2017-2019, avant la crise sanitaire donc (graphique 1).
Ce phénomène est d’autant plus impressionnant qu’il survient alors que les prix augmentent, révélant donc un potentiel retrait des achats en volume.

Décrochage du Bio

Les ventes de produits bio ont connu un vrai décrochage dès 2021, avec une baisse du chiffre d’affaires en grandes surfaces généralistes et en distribution spécialisée bio, alors qu’il a continué à croître chez les artisans-commerçants et en vente directe. Au-delà des raisons évoquées plus hauts, on peut également relever le recul de l’offre en produits bio dans les rayons depuis fin 2021 et qui s’est confirmé en 2022 (graphique 2).
C’est une vraie rupture avec la décennie précédente où la progression du marché a parfois dépassé les 20% certaines années pour certains produits.

Hormis le prix, qui reste le premier frein à l’achat, y a-t-il un problème d’image de la bio auprès des Français ?
Dans une enquête conduite en 2020, l’institut Kantar a ainsi relevé un ternissement des motivations d’achat des produits alimentaires bio. Les répondants étaient moins nombreux à indiquer acheter bio pour le respect de l’environnement, pour une garantie d’absence de pesticides, d’OGM, ou pour des raisons de santé.


Dans un autre sondage conduit en juin 2022, les intentions d’achats de produits bio reculaient de 10 points par rapport à 2020. Parmi les motifs invoqués par les sondés, le fait qu’ils pouvaient trouver des produits de qualité non bio était en nette progression. On voit donc que dans les multiples enjeux auxquels la bio est confrontée, il y a celui de clarifier ce que le label certifie pour les consommateurs, et ce qui justifie le surcoût à payer.

 

L’exemple signifiant de la filière lait BIO

La production française de lait Bio a continué d’augmenter en 2022. « Sur l’année entière, la collecte se situera légèrement au-dessus de l’année 2021 (+2 à +3%) », d’après l’Idele.
Pendant ce temps, le prix du lait bio est resté similaire à celui de 2021 tandis que le prix du lait conventionnel bondissait de près de 25 % (cf graphiques ci-contre).

Conséquence, le nombre de livreurs en Bio stagne, les conversions sont à l’arrêt, et les fabrications de produits laitiers biologiques reculent (jusqu’à -25 % en crème et -19 % en beurre) et les déclassements augmentent, jusqu’à représenter 46 % des fabrications en cumul sur 10 mois contre 37 % en 2021, apprend-on dans la lettre Tendances de l’Idele.

Prudence est mère de sureté

En conclusion, je voudrais saluer l’excellent travail de Marine Raffray (Chambre d’Agriculture France). Cet article est largement inspiré du sien paru dans la lettre économique n°432 de l’APCA de décembre 2022. Les temps sont difficiles pour la production biologique, l’inflation sur les prix alimentaires semblent avoir eu raison des bonnes intentions du consommateur qui essaie de sauver son pouvoir d’achat. Mais les aménités positives de la production restent nombreuses à l’heure où l’on veut concilier alimentation et environnement. Les objectifs politiques restent ambitieux tant sur la loi EGALIM pour la restauration collective, que pour la progression des surfaces en Bio et la réduction des intrants (nouvelle PAC 2023-2027). Pour l’instant il faut rester pragmatique et n’envisager de conversion BIO que si l’on est sûr d’avoir des débouchés après discussion avec ses principaux acheteurs et une étude de marché sérieuse si l’on est en création d’activité.

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