INFO BIO BFC - Le site d'informations techniques de la bio en Bourgogne-Franche-Comté

Produire des protéines sans produit phyto, quelques bases à appliquer et pièges à éviter !

Deux journées Techniques « Les graines de protéagineux : un pas de plus vers l’autonomie ? Intérêts Zootechniques ; Démonstration Toasteur et Témoignage Eleveur » sont organisées par un groupe de travail (organismes de conseil en élevage, chambres d’agricultures, CUMA Franche-Comté, Interbio Franche Comté) en deux lieux différents sur la région : Port-sur-Saône le 29/11 et Dannemarie-sur-Crête 30/11. En amont de ces deux journées nous vous proposons une série de trois articles techniques, successifs et mensuels, sur la production, l’utilisation des protéagineux pour l’alimentation animale et le toasteur mobile.

 

Produire la protéine sur la ferme peut être très intéressant, si on maîtrise quelques bases. Une culture de légumineuses représente, si elle est réussie, une production d’environ 600kg de protéines/ha ! Ça vaut le coup d’essayer…

Espèce
Taux de protéines moyen
Rendement q/ha
Production de protéines moyen, cultivé en pur kg/ha
Féverole 29% 30 700
Pois 25% 30 600
Soja 35% 22 600
Lupin 35% 20 600

Attention aux particularités pour les monogastriques et à la toxicité de certains protéagineux en brut (pas de transformation).

  • Voir prochains articles de la série…

Une bonne rotation, une des meilleures préventions !

La base de la production de protéagineux sans phytosanitaire réside dans la rotation. Si elle est bien conçue, elle permet de diminuer fortement les pressions des maladies, adventices et ravageurs. La base pour les protéagineux est de ne pas les faire revenir sur une même parcelle trop souvent, malgré leur fort intérêt par rapport à la nutrition azotée des cultures suivantes.

Une période de 5-6 ans est à respecter entre deux légumineuses pour se prémunir des maladies des cultures. En effet, plusieurs maladies touchent les légumineuses (aphanomyces, anthracnose…) et peuvent être fortement limitées si la rotation des cultures sensibles est suffisamment espacée.

Attention aussi aux autres familles de plantes cultivées qui pourraient être hôtes d’une même maladie. C’est le cas de sclérotinia qui infecte le pois, le soja, la vesce et les oléagineux. Pour cela, il faut respecter un délai minimum de 3 ans entre ces cultures.

On peut ici faire une remarque sur les associations de cultures qui réduisent les risques occasionnés par la succession rapprochée de certaines cultures. En effet, le mélange de plusieurs espèces semblerait les protéger au moins partiellement de certaines maladies.

Quels protéagineux pour quel sol ?

Les protéagineux font partie de la famille des légumineuses. Grâce à leur association avec une bactérie, ces plantes sont capables d’utiliser l’azote gazeux du sol pour fabriquer leur propre azote et  d’en restituer une partie au sol à la fin de leur cycle végétatif. Cette remarquable propriété est optimale dans les sols aérés et sera fortement pénalisée dans les sols hydromorphes et/ou tassés

Rappel : En moyenne, un sol bien structuré doit être composé de 50% de vide (micro et macro porosités)

Par ailleurs, les protéagineux ont besoin d’une bonne réserve hydrique pour subvenir aux besoins des graines de gros diamètre. Toutefois, selon les conditions du sol, plusieurs possibilités sont envisageables.

Voici un ordre de préférence selon les types de sols dont vous pouvez disposer :

Type de sol
Ordre de préférence de protéagineux
Sol plutôt séchant : Eviter les légumineuses à grosses graines très sensibles au déficit hydrique (remplissage des graines)

Lentille>vesce>pois>lupin>féverole hiver/soja>>> pas de féverole printemps

Sol hydromorphe : Les légumineuses sont très sensibles à l’hydromorphie

Eviter les protéagineux

Sol calcaire >10% calcaire actif : pas de lupin, sensibles à la chlorose ferrique
Parcelle à pression adventice croissante Préférer les cultures binées (féverole, soja, lupin) pour pouvoir intervenir plus tardivement

 

Hiver ou printemps, comment choisir ?

Dans l’objectif de réduire ou de se passer des produits phytosanitaires, il faudra privilégier la gestion de la rotation, et notamment l’alternance printemps/hiver, pour garder une certaine maîtrise des adventices.

En culture pure, les pois protéagineux d’hiver ne sont pas recommandés en AB ou sans traitement phytosanitaire. En effet leur long cycle de culture les rend sensibles aux adventices or les outils mécaniques ne peuvent plus être utilisés dès que les vrilles des plantes se touchent. Les associations sont alors recommandées avec des doses de semis réduites à 70% pour le pois et 50% pour la céréale.

La féverole de printemps est très sensible au déficit hydrique de juin/juillet. La féverole d’hiver sera donc préférée sur les sols séchants. La féverole d’hiver présente également souvent une végétation plus concurrentielle vis-à-vis des adventices que la féverole de printemps.

A propos du lupin, le choix est simple, car la résistance du lupin d’hiver se limite aux conditions de l’ouest et du sud de la France. Il faudra donc forcément s’orienter dans notre région vers du lupin de printemps.

A savoir : chez les protéagineux, seul le lupin d’hiver a un besoin de vernalisation pour fructifier. Les semis d’automne pour le pois et la féverole ne seront possibles qu’avec des variétés résistantes au froid.

Comment gérer les principales maladies et ravageurs sans produits phytosanitaire ?

Pour ce qui est des maladies sur les protéagineux, la production sans l’utilisation de produit phytosanitaire implique d’éviter les conditions à risque. La qualité des semences est importante car nombre de ces maladies se propagent par ces dernières (attention aux semences de ferme). En TCS les résidus de culture non broyés et en surface sont vecteurs de maladies. Enfin éviter les peuplements trop denses, voire semer en mélange avec une autre espèce (céréale ou autre).

 

Recommandations pour les semis :

Espèce Dates de semis recommandées Densités de semis recommandées
Pois de printemps (sensible à l’aphanomyces) entre le 1er février et le 15 mars 100 grains/m² en sol caillouteux ou 85/90 grains/m² en sol limoneux

 

Féverole hiver

 

à partir du 20 octobre 30-35 grains/m²
Féverole printemps 1er février au 15 mars 25-30 grains/m²
Lupin (très sensible à l’anthracnose) fin février à mi-mars 60 grains/m²
Soja 00 : fin avril à fin mai *

000 : début mai à début juin*

650 000 à 700 000 grains/ha

700 000 à 750 000 grains/ha

Pour des écartements de 15 à 40 cm.

Avec 00 : des variétés précoces et 000 : des variétés très précoces !

Zoom sur l’aphanomyces

Cette maladie devient très problématique lorsqu’elle s’installe sur une parcelle car elle peut l’infecter pendant plusieurs dizaines d’années. Il est donc primordial de prévenir son arrivée par des rotations bien réfléchies.

Toutes les espèces de légumineuses n’y sont heureusement pas sensibles, ce qui vous permettra d’alterner entre elles pour diminuer le risque.

Sensible
Sensible selon les variétés
Non hôte ou très résistante
  • Pois : hiver sont moins sensibles car plus développé au printemps (période d’attaque)
  • Lentille
  • Luzerne
  • Gesse
  • vesce selon les variétés, peut y être très sensible, dans tous les cas elle multiplie l’inoculum
  • trèfle blanc selon les variétés, peut y être plus ou moins sensible, mais multiplie dans tous les cas l’inoculum
  • trèfle violet souvent moins sensible mais attention, l’inoculum peut être quand même multiplié
  • féverole,
  • lupin,
  • soja,
  • pois chiche,
  • fenugrec,
  • lotier,
  • sainfoin
  • trèfle Alexandrie,
  • trèfle hybride,
  • trèfle incarnat

 

Et les ravageurs …

La lutte contre les ravageurs des protéagineux sans produit phytosanitaire repose sur la biodiversité. Biodiversité au sein des parcelles en multipliant les espèces cultivées et les associations de différentes familles de plantes. Biodiversité autour des parcelles en préservant les habitats des oiseaux, insectes et autres prédateurs des ravageurs des cultures. Il n’y a pas de solution curative naturelle, il faut forcément prévenir !

Quelques caractéristiques propres à chaque espèces

  • Féverole hiver :
    • Semer très profond (7 à 10 cm) pour éviter les gelées si l’hiver est trop rude.
    • La récolte s’effectue généralement autour du 15 août pour la féverole d’hiver, et fin août/début septembre pour les semis de printemps.
  • Lupin :
    • Attention au sol calcaire,
    • Pensez à inoculer vos semences,
    • Récolte tardive (août/septembre)
  • Pois :
    • Le pois protéagineux de printemps est sensible au salissement
    • Le pois fourrager est plus résistant au froid, mais sensible à la verse (cultiver en association avec des céréales)
  • Vesce :
    • Eviter les sols riches où elle est très exubérante mais ne fait pas de gousse.
    • Plutôt la cultiver en mélange, car tend fortement à verser (et ne pas mettre en grosse proportion dans les mélanges pour les mêmes raisons)
  • Soja :
    • Penser à inoculer (Rhizobium japonicum) la semence pour des nodosités fonctionnelles et actives car cette bactérie n’est pas présente naturellement dans nos sol (le soja est une plante originaire d’Asie).

 

Alice Dousse Interbio FC et Luc Frèrejean CA 70

 

Pour en savoir plus sur la production de protéagineux sans produits phytosanitaires et sur leur utilisation en alimentation animale, rendez-vous aux journées « LES GRAINES DE PROTEAGINEUX, UN PAS DE PLUS VERS L’AUTONOMIE ? »

Le 29 novembre au lycée agricole de Port-sur-Saône ou le 30 novembre au lycée agricole de Dannemarie-sur-Crête. (Voire dans notre agenda)

Ces journées sont organisées par un groupe de travail réunissant Interbio FC, les organismes départementaux de Conseil Elevage, les chambres d’agriculture, le réseau CUMA Franche-Comté et les lycées agricoles de Port- sur-Saône et Dannemarie-sur-Crête.

Laisser un commentaire

Fermer le menu