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De la lutte campagnols au pain local : tout un chemin que des éleveurs bio empruntent …

Depuis 2009, le groupe d’agriculteurs « Charquemont Lutte Anti-campagnols », la FREDON, la Fédération des Chasseurs du Doubs, l’ONCFS et la Chambre Interdépartementale d’Agriculture Doubs –Territoire de Belfort, expérimentent l’implantation de céréales en altitude dans le cadre du contrôle raisonné des populations de campagnols terrestres.

Parmi la douzaine de fermes, 2 exploitations bio adaptent le concept de lutte à leur cahier des charge.

Dix ans d’expériences

Cela fait maintenant 10 ans que les moissonneuses ont réinvesti ce secteur du Haut Doubs. Cet article permet de faire le point sur une action de développement rural qui rassemble de nombreux partenaires œuvrant dans le sens du développement durable. La prise en compte des attentes des éleveurs a permis de diversifier les expérimentations soutenues par le programme Agrifaune. Tout d’abord il a fallu convaincre des agriculteurs de dédier quelques hectares d’herbe à un semis de céréales. Au départ le triticale a été choisi pour sa rusticité, et pour sa très bonne production de paille ! Oui, en montagne la récolte de litière devient un atout important vu les prix d’achat !

Besoins de diversité

Avec les premiers retours d’expérience très positifs en termes de rendement (50 q et 5 T de paille/ha sur de vieilles prairies riches en matière organique) certains producteurs ont souhaité rejoindre le groupe initial, pour passer progressivement de 6 à 13 exploitations et de 9 à 40 ha. La liste des cultures s’est diversifié tant en conventionnel qu’en bio (2 fermes). Les méteils, mélange de céréales, seigle avec de la vesce ou parfois du pois, sont plutôt prisés par ceux qui fabriquent leur concentré. Des céréales hybrides ont été testées par rapport à leur capacité de rendement dans des conditions plus rudes, mais vu les bilans technico-économiques globaux, le surcoût des semences est peu justifié. Puis l’orge d’automne a trouvé sa place dans les semis de 2iéme labour. En effet sa précocité permet de moissonner au moins 15 jours avant le triticale, le seigle ou les méteils. C’est du temps de gagné pour semer la future prairie. Et l’an dernier le blé panifiable a fait son apparition !

A l’occasion du bilan réalisé en 2018, la plaquette éditée reste disponible sur demande.

Du labour doublement utile

(voir encart listant les 17 outils de lutte, la plus part utilisable en bio !)

Un des moyens de lutte contre le campagnol terrestre est de réaliser 2 années de cultures avant la réimplantation de la prairie. Une étude de la FREDON a montré que la densité relative de campagnols terrestres est bien inférieure dans les céréales (4 fois moins) et les praires temporaires (2 fois moins) que dans les prairies sans travail du sol.

Mais il apparait que cette pratique apporte aussi une amélioration significative sur la qualité prairiale (qualité floristique, meilleur rendement et meilleure résistance face aux aléas climatiques). Un diagnostic a été réalisé à partir de 3 fosses pédologiques (prairie permanente, prairie de 7 ans et une de 2ans). On a pu constater que la structure du sol et le système racinaire, les plus dégradés correspondaient à la prairie la plus ancienne, alors que les deux autres situations présentaient un enracinement efficace sur l’ensemble du profil.

Tout ça pour faire du foin ! Tout au long de cette expérience il ne fallait pas oublier qu’à l’ origine le challenge était de sécuriser les besoins fourragers du troupeau et limiter les déficits suite aux dégâts de campagnols. En même temps l’évolution du climat nous amène aussi à réfléchir à la productivité qualitative et quantitative des prairies. La réimplantation de prairies à flore variée après 2 années de travail du sol, permet en général une nette amélioration, en éliminant des plantes indésirables ou peu productives, et en choisissant des mélanges prairiaux bien adaptés au sol et à l’utilisation fauche/pâture prévue. Néanmoins le sursemis ou semis « pré sur pré » bien réalisé peu donner satisfaction au moins sur l’aspect flore, mais ce sera moins efficace pour la lutte campagnols. mais n’oublions pas que les « bonnes » pratiques d’entretien des prairies et de la fertilité du sol restent une base incontournable d’efficacité, et cela même pour les prairies rénovées !

Même en limitant les « bouches à nourrir » il faut aussi se poser la question de la culture d’herbe sur une partie de sa ferme. Un système fourrager autonome, efficace et économe, est souvent le pilier de voute de l’efficacité économique.

Des partenaires solidaires autour du champ

L’expérience CLAC est un bon exemple du « Réussir ensemble » ; En effet comme nous l’avons vu en introduction cette opération est encadrée par 3 organismes, qui se concertent régulièrement avec les agriculteurs. La fédération de chasse apporte une collaboration importante pour faciliter la protection des parcelles contre le sanglier, et le programme Agrifaune permet de comptabiliser les évolutions positives sur la biodiversité. La Fredon continue ses enregistrements pour vérifier la maitrise des pullulations de campagnols sur la zone expérimentale. Et la CIA 25/90 poursuit l’accompagnement et l’enregistrement des résultats au niveau des cultures et des semis de prairies.

Ce projet a pu se réaliser et s’étendre grâce à la forte présence d’Entreprises de Travaux Agricoles, pour le travail du sol, le désherbage mécanique, les semis et les récoltes. Leur matériel efficace et leur savoir-faire permettent aux éleveurs de devenirs cultivateurs !

Les collecteurs de céréales ont aussi joué le jeu, en s’intéressant à une petite récolte éparse et variée.

Du blé sans traitement pour du pain local

Afin de répondre à la demande des consommateurs qui veulent des aliments sains et locaux, des acteurs de la fabrication du pain viennent de mettre en place une filière.

Le blé du GAEC Delavelle (ferme conventionnelle) à Charquemont a été transformé par la minoterie Dornier et sera utilisé avec d’autres blés locaux par les boulangeries Monnet de Damprichard et Bla-Bla de Bonnétage. Pour 2020 du blé bio pourrait être introduit au mélange de farines locales.

Malheureusement, il n’y aura pas encore assez de blés bios locaux pour identifier un pain bio !

Parole aux acteurs :

« Nous avions commencé à planter des céréales il y a une dizaine d’années et cette année nous avons testé 1.8 ha de blé. Vu les bons résultats (68 q) nous avons semé 5 ha cet automne. Les céréales sont toujours réalisées sans traitements, depuis le début de l’expérimentation, quelquefois un désherbage mécanique est réalisé. La fertilisation provient majoritairement des exploitations »

précise Guillaume Delavelle.

« Cette création de filière locale a demandé beaucoup de concertation entre les différents acteurs, mais cela prouve que quand on veut on peut »,

souligne M. Denis Vermot, technicien chez Dornier.

« Étant très attentifs à la qualité des produits que nous fabriquons, c’est tout naturellement que nous nous sommes investis dans cette opération qui propose aux consommateurs du pain avec un excellent bilan carbone »

assurent les deux boulangers.

C Faivre CIA 25/90

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